The Handmaid's Tale
The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Dans une dictature où la stérilité a frappé les femmes, ces dernières sont divisées en trois catégories : les Épouses, qui dominent la maison, les Marthas, qui l'entretiennent, et les Servantes, dont le rôle est la reproduction.
En cours | Américaine, CA, US | 50 minutes |
Drame, Science-Fiction, Drama, Science-Fiction & Fantastique | Hulu | 2017 |
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5.07 - No Man's Land
No Man's Land
En cavale, Serena et June confrontent leurs opinions. Si la première finit par s'excuser, la seconde refuse catégoriquement de lui pardonner. Les deux ennemies vont devoir malgré tout s'entendre. Toujours aussi intense, cette cinquième et avant-dernière saison se concentre sur l'opposition entre June et Serena.
Diffusion originale : 19 octobre 2022
Diffusion française :
19 octobre 2022
Réalisat.eur.rice.s :
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Avis favorable | Déposé le 22 octobre 2022 à 02:22 |
Le No Man's Land est-il un Woman's Land? C'est un épisode que j'attendais et voulais, même si je ne l'attendais pas nécessairement sous cette forme. Je ne pensais pas non plus mettre 16/20 mais tout le déroulement et sa conclusion font ressortir tellement d'éléments complexes, difficilement explicables ou quantifiables, que j'ai vraiment envie de le mettre en avant. Je ne suis pas quelqu'un de très friande concernant les relations amoureuses entre personnages et ce qui m'intéresse dans le storytelling, ce sont les relations qui vont au-delà de l'amour, la romance, l'attirance, la famille, l'amitié... Ce qui me fascine, ce que je cherche, c'est typiquement la relation entre June et Serena. Elle n'est pas définie ni définissable, mais pourtant elle se vit, elle se déroule sous nos yeux depuis cinq ans. Le choix de les lier à travers l'accouchement de Serena fait sens, vraiment, dans une société où l'enfantement est vue comme le plus beau des cadeaux (quitte à y perdre la mère, comme les flashbacks le montrent). Il fait sens aussi dans une société littéralement construite par Serena car elle voulait un enfant, mais ne pouvait pas. Il y a des images sublimes (Strahovski est d'ailleurs merveilleuse), notamment celle où front contre front, elles s'unissent dans le moment de l'accouchement. En même temps, rien n'est facile. La série choisit de lier les femmes par la maternité (qu'elles puissent la vivre ou non), et si ça peut être vu comme dérangeant, je trouve ça pertinent ici puisque l'histoire est sur la maternité. Le lien que June et Serena partagent est inexplicable, mais il est là. Toute l'ambigüité ressort à la fin, "grâce" à la présence de Luke qui a toujours un temps de retard et qui, bien que bienveillant, symbolise deux césures, à la fois entre celui qui n'a pas connu Gilead et celles qui l'ont vécu (malgré la différence entre leurs expériences) et entre celui qui ne peut pas enfanter et celles qui peuvent. June fait un choix, elle le fait même plusieurs fois, en partant puis en revenant auprès de Serena. Elle ne le fait pas facilement, mais elle le fait. Elle fait aussi le choix de ne pas torturer Serena au moment où elle tient le bébé et où, dans son regard, passe la flamme du contrôle tout-puissant. À la fin, et je pense que je ne suis pas la seule, j'ai vraiment pensé "au fond, je ne souhaite ça à personne, même à ma pire ennemie" et c'est ce qui semble traverser June également. Luke apparait donc comme un briseur, une péripétie qui gâche ce qui avait été peut-être le début d'une possibilité de guérison. Maintenant que Serena est dans un no man's land, et qu'elle a vécu l'enfermement puis l'accouchement (comme June, dans une moindre mesure), elle n'est pas de Gilead. La complexité vient aussi être renforcée par le fait que ça ne remet pas en cause la Foi de Serena, mais ça remet en cause le système tel qu'il est construit. En ça, June et elle peuvent être alliées, comme elles auraient pu l'être depuis plus longtemps que ça. Chacune de ces deux femmes est complexe (oui, beaucoup de "complexe" dans cet avis), avec ses défauts, ses qualités, ses biais, ses souffrances, ses forces et ses vulnérabilités. Ses combats et ses expériences aussi. Mais de voir qu'elles peuvent quand même partager un lien pratiquement indestructible, sans essayer de l'expliquer, fait de cet épisode un très bel épisode. En accouchant Noah, June se lie d'autant plus à Serena, et cette dernière ne peut plus vivre sans June. Leur interdépendance, qui n'est pas choisie, peut être vue aussi comme une allégorie de ce qui peut lier les femmes entre elles (encore une fois, qu'elles puissent enfanter ou non), et de ce qui pourrait se passer si elles se levaient contre le système. |
Le tandem June/Serena est au centre de cet épisode qui arrive à point nommé dans la saison. À un moment où Serena a des éclairs de bonne conscience, qu’elle a toujours eus par pointe (June s’en souvient, dès leurs premiers jours ensemble en assistant à une séance d’accouchement ridiculement cérémonieuse à Gilead). June et Serena se détestent mais sont ici alignées temporairement pour notre plus grand plaisir.
Ce qui est très intéressant, c’est que la nature de Serena fait ressortir le vrai visage de June, celui qui s’était parfois un peu perdu en chemin depuis Toronto : celui de la compassion. Le moment où elle réalise que si elle accepte de laisser Serena à sa mort après son speech “les mères ne sont que des vaisseaux destinés à mettre au monde”, alors elle deviendrait comme Serena et admettrait que les servantes n’ont aucune humanité.
Le flashback sur Gilead est particulièrement pertinent pour dépeindre cette horrible vision de “vaisseaux”. Il aura fallu attendre que les deux femmes soient libres de leurs choix pour voir un véritable rapprochement et un vrai “accouchement partagé”, dans un sublime plan tête contre tête, bien loin de la froideur hypocrite des Épouses qui maintiennent les poignées de leur esclave à Gilead.
Cet excellent passage rapproche finalement les femmes une ultime fois… avant que la fin de l’épisode ne vienne (évidemment) mettre une halte à ce happy-end, où Luke prend sa revanche sur Serena en n’ayant pas vécu toutes les spécificités avec elle comme June.
Quelque part on “souhaitait” une punition à Serena, mais clairement, celle-ci sonne trop. Je ne sais plus quoi penser, et je pense que June non plus, c’est donc parfait. June reste malgré tout une balise véhiculant le “bien”, elle est foncièrement bonne, mais on ne peut que ressentir comme elle le frisson du contrôle et de la possibilité de revanche quand elle tient le bébé de Serena dans ses bras. Elisabeth Moss est d’ailleurs excellente pour transmettre cette lueur furtive mais bien présente, que le montage souligne avec un timing parfait, avant de contempler quand même que Noah n’a rien demandé et qu’il est innocent.
Traditionnellement chaque saison apporte son épisode “huis-clos intimiste”, et celui-ci était encore une jolie entrée dans la liste. En termes de performances c’est évidemment réussi, la réalisation rend également les longues minutes de souffrance presque agréables à admirer, avec tout plein de symboles (Serena baignée de lumière, June dans un clair-obscur plus flou) rendant le rapprochement final d’autant plus jouissif.
Les dialogues sont aussi toujours de l’or en barre avec ces deux personnages. Je suis particulièrement fan de la reprise de June qui saisit le menton de Serena pour lui dire “Do you understand me?”, comme lorsqu’elle l’a revue pour la première fois au Canada. Mais cette fois, l’intention est opposée (le plan est d’ailleurs littéralement inversé), et elle le dit avec délicatesse, montrant une vraie compréhension.
Un bien bel épisode très simple mais très riche, qui continue la bonne lancée de cette seconde partie de saison.